Elle avait l’arrogance et la fierté de l’âge
Jeunesse flamboyante espièglement volage.
Je l’ai croisée un jour et bien mal m’en a pris
Mais c’est sans doute ainsi que j’ai beaucoup appris.
Le temps passe bien vite et comme en opérette
Je l’ai revue un jour au bout de ma lorgnette.
Elle occupait la scène en un long monologue
Car plus aucun acteur ne voulait du dialogue.
Je n’ai pas applaudi, la tirade était fade.
La longue litanie de tristes jérémiades
Me fit goûter bien plus l’oasis de quiétude
Qui hante désormais ma chère solitude.
Mes plaintes et mes cris, moi je me les écris.
Les mots sont silencieux, sur le papier inscrits.
Certes j’ai eu aussi mon lot de turpitudes
Je n’en ai pour autant aucune certitude.
On peut avoir été lésé par accident
Mais il en est pour moi un constat évident
C’est que, à un moment, on a prêté le flanc
Et que dans cette vie rien n’est jamais blanc-blanc.
Son arrogance est là, il y a toujours l’âge
Qui ne s’est pas privé d’infliger ses outrages
A chacun son destin et à chacun ses rides
Et si lisse est la vie acceptons-en le vide.
Là je parle pour moi, à soixante-huit ans,
La nature est si belle et j’ai si peu de temps.
J’ai pour me consoler mon vieil ami le banc
Il n’y a qu’avec lui que je publie les bans.